Chanter améliore l'humeur des nourrissons, montre une nouvelle étude


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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — Chanter à un nourrisson peut grandement améliorer son humeur, non seulement dans l'immédiat, mais aussi à long terme, montre une nouvelle étude.
«C'est clair que la musique est importante pour les enfants, on n'a pas besoin de faire d'expériences pour savoir ça, a expliqué l'auteur de l'étude, le professeur Samuel Mehr de l'Université d'Auckland. Mais la relation de causalité est moins évidente entre des expériences musicales particulières et un résultat concret.»
Une centaine de parents ont été recrutés pour cette étude. La majorité d'entre eux avaient un nourrisson de quatre mois ou moins. Les participants ont été aléatoirement répartis entre deux groupes, dont un à qui, par exemple, on a enseigné de nouvelles chansons pour l'encourager à chanter au bébé plus fréquemment.
Plusieurs fois par jour, pendant quatre semaines, les participants ont été questionnés par le biais de leur téléphone intelligent au sujet de l'humeur du nourrisson, de son irritabilité, du temps passé à le réconforter, de leur propre humeur et de la fréquence des comportements musicaux.
Les chercheurs ont constaté que les membres du premier groupe passaient non seulement plus de temps à chanter à leur nourrisson, mais qu'ils avaient particulièrement recours au chant quand ils devaient réconforter le bébé ― un comportement qu'ils ont adopté par eux-mêmes, et non parce que cela leur était demandé par les auteurs de l'étude.
«Le fait que les parents, de leur propre accord, aient décidé de chanter parce que le bébé était maussade nous montre à quel point c'est un comportement 'naturel', a dit le professeur Mehr, qui est également un membre associé du laboratoire BRAMS de l'Université de Montréal. On dirait donc qu'il y a quelque chose d'encodé (hard wired) au sujet de la musique en général, mais spécifiquement au sujet de la musique pendant l'enfance.»
La nouvelle étude montre donc qu'«une brève intervention chantée augmente la fréquence du chant destiné aux nourrissons, que les personnes qui s'occupent d'eux étendent intuitivement ce comportement musical spécifiquement au contexte de l'apaisement de leurs nourrissons, et que ces changements dans l'environnement musical familial entraînent une amélioration générale de l'humeur des nourrissons», résument les auteurs.
La cinquantaine de parents du groupe témoin ont profité d'une intervention similaire au terme de l'expérience initiale.
Pas une amélioration ponctuelle
L'aspect le plus important de l'étude, ajoutent les auteurs, est toutefois le suivant: l'amélioration de l'humeur du nourrisson a été rapportée peu importe que la personne qui s'occupe de lui ait récemment chanté ou non, ce qui implique une amélioration généralisée, et non ponctuelle au moment du chant, de l'humeur.
«Les présents résultats confirment donc l'existence d'un lien de causalité entre un environnement musical enrichi et une amélioration générale de l'humeur des nourrissons», affirment les auteurs.
«C'est ce qui nous a le plus surpris, a renchéri le professeur Mehr. On n'a pas demandé (aux participants) de chanter au nourrisson et de nous dire comment ça influençait son humeur. On leur a envoyé des textos à divers moments pendant la journée pendant toute l'étude. Donc l'effet vraiment surprenant est l'effet généralisé, que les nourrissons semblaient plus heureux.»
De plus, les chercheurs n'ont détecté aucun signe que le chant améliorait l'humeur des responsables, ce qui exclut que l'amélioration de l'humeur rapportée des nourrissons soit dans les faits un reflet de l'humeur améliorée de ceux qui leur prodiguent des soins.
Et comme les participants à l'étude ont été invités à témoigner de l'humeur du nourrisson «en temps réel» lorsqu'ils recevaient un texto à cette fin, on peut aussi exclure un éventuel «biais de rappel» qui déformerait leur perception de la situation.
L'efficacité du chant pour améliorer l'humeur d'un nourrisson «est évidente pour ceux pour qui c'est déjà évident», a ironisé le professeur Mehr.
«Mais ça ne fait pas partie du curriculum des parents, a-t-il conclu. Je pense donc que c'est important d'avoir des données très claires, empiriques, concernant ces comportements.»
Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal scientifique Child Development.
Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne