Décès de Normand Meunier: «je n’ai jamais vu une plaie d'une telle ampleur»


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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — Les audiences publiques pour faire la lumière sur le décès de Normand Meunier ont débuté lundi au palais de justice de Montréal. M. Meunier avait recouru à l'aide médicale à mourir pour mettre fin à ses souffrances après avoir connu des complications lors d'un séjour à l'hôpital de Saint-Jérôme.
En janvier 2024, Normand Meunier, un homme tétraplégique de 66 ans, s'était rendu à l'hôpital de Saint-Jérôme pour traiter un virus respiratoire.
Il a développé une plaie de pression majeure au fessier pendant un séjour de 96 heures à l’urgence, où il était couché sur une civière plutôt que sur un lit adapté à sa condition, comme le réclamait sa conjointe.
«C'était une bataille continuelle, on a même menacé de me radier de l’hôpital», a indiqué la veuve de M. Meunier, Sylvie Brosseau, en s'adressant aux journalistes lundi.
«J’espère qu'il y ait une lumière qui se fasse pour que, finalement, tout le monde travaille ensemble» et «j'espère que ça va changer les choses parce que jusqu'à date, ça n'a pas changé », a-t-elle ajouté.
Un homme avec beaucoup d'antécédents médicaux
M. Meunier est devenu tétraplégique en 2022 et son état de santé, déjà fragile, s’est détérioré à partir de ce moment.
Il a été admis à l’Institut de réadaptation Gingras-Lindsay de Montréal en avril 2022.
«Il avait beaucoup d’antécédents médicaux», comme «le diabète, l’anémie, l’apnée du sommeil, de l’insuffisance rénale», en plus de l'obésité et de douleurs importantes aux épaules, a expliqué la cheffe de réadaptation à l’institut, Caroline Joly.
C’est au printemps 2022 qu’apparaissent les premières plaies de lit sur le corps de M. Meunier.
Entre 2022 et 2024, il a été hospitalisé à plusieurs reprises pour différentes raisons et il a reçu des soins au Centre hospitalier de Saint-Jérôme, à l'Hôpital du Sacré-Cœur-de-Montréal, à l'Institut de réadaptation Gingras-Lindsay-de-Montréal, mais aussi à son domicile.
Un matelas thérapeutique qui arrive trop tard
Valérie Christin, enquêteuse de la Sûreté du Québec, a expliqué, lors de l'audience lundi, que le patient a été hospitalisé du 18 au 29 janvier 2024 pour un problème pulmonaire.
«Un matelas thérapeutique sera commandé (par l’hôpital de Saint-Jérôme) le 26 janvier, mais il ne sera livré que le 29 janvier et à ce moment-là, monsieur a déjà eu son congé de l'hôpital et il est retourné à la maison», a indiqué la policière.
Quelques jours après sa sortie de l'hôpital, le 2 février 2024, l’infirmière Nathalie Forget, qui connaissait M. Meunier, car elle l’avait soigné sur une période d’environ un an, a constaté l’ampleur de ses nouvelles plaies de lit.
L’une des lésions «était une plaie extrêmement impressionnante, je n’avais jamais vu ça, c’était du tissu mort», a raconté l’infirmière.
«Je n’ai jamais vu une plaie d'une telle ampleur de toute mon expérience médicale», a également témoigné la collègue de Mme Forget, l’infirmière Ecaterina Clefas, qui a également rencontré M. Meunier à son domicile le 2 février 2024.
Selon le témoignage d’Ecaterina Clefas, le patient n’aurait jamais dû recevoir son congé de l’hôpital.
«Le plus étonnant dans cette histoire, c’est qu’habituellement, avec une telle gravité de plaie, on ne laisse pas le patient aller à la maison», a témoigné l’infirmière.
«Habituellement, tout le tissu qui est mort, il faut qu’il soit chirurgicalement retiré du corps», donc «ça prend un milieu stérile qu’on ne peut pas assurer à domicile», car «une telle intervention sur la plaie aurait mis le patient en risque de saignement important», a -t-elle expliqué.
Le 2 février 2024, Normand Meunier retourne à l’hôpital de Saint-Jérôme.
«Il sera à nouveau hospitalisé, en raison d'une plaie de siège importante» et il «subira un débridement de la plaie le 5 février», a expliqué l'enquêteuse Valérie Cristin, qui a ajouté «qu'à partir de ce moment-là, le pronostic de guérison sera mauvais».
Normand Meunier, 66 ans, a reçu l’aide médicale à mourir le 29 mars 2024.
Mardi, des employées du CLSC Lafontaine, qui offraient des services de soutien à domicile au patient, témoigneront devant le coroner Me Dave Kimpton.
Stéphane Blais, La Presse Canadienne