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Jason Kenney critique l'éventualité d'un référendum sur la souveraineté en Alberta

durée 08h00
15 septembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Temps de lecture   :  

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Par La Presse Canadienne, 2025

CALGARY — L'ancien premier ministre de l'Alberta, Jason Kenney, ne mâche pas ses mots lorsqu'on l'interroge sur une possible séparation de l'Alberta.

Il affirme qu'il s'agit d'un concept historiquement discrédité, porté par une poignée de mécontents, et qui ne manquera pas de détruire le tissu social de la province qu'il prétend défendre.

«C'est absurde de laisser une petite minorité éternellement en colère entraîner toute la province dans un débat profondément conflictuel», a lancé M. Kenney lors d'une récente entrevue dans une salle de conférence du Bankers Hall de Calgary, où il est conseiller principal d'un cabinet d'avocats et travaille avec des conseils d'administration d'entreprises.

«(Ce serait) un référendum qui diviserait les familles, les communautés et les amis, sans raison valable, a-t-il avancé. Si la question est soumise au vote, des mariages seront brisés. Des conjoints et des conjointes ne pourront tout simplement pas se tolérer à cause de leurs opinions sur ce sujet.»

Jason Kenney, ministre conservateur fédéral de longue date et premier ministre de l'Alberta de 2019 à 2022, croit qu'une petite minorité ne devrait pas pouvoir promouvoir un programme séparatiste qui touche tout le monde.

«Il y aura des entreprises dont les partenariats seront rompus. Il y aura des églises et des organisations communautaires qui se sépareront à cause de cela. Voilà à quel point la situation est explosive.»

Il a proposé cette analyse alors que le gouvernement du Parti conservateur uni de la province, dirigé par la première ministre Danielle Smith, poursuit une politique à deux volets: exhorter l'Alberta à rester dans le Canada, tout en facilitant la tenue d'un référendum sur la sortie du Canada.

Le gouvernement a récemment abaissé les exigences pour l'organisation d'un tel référendum, avec 177 000 signatures à recueillir sur quatre mois dans cette province de cinq millions d'habitants.

M. Kenney s'oppose officiellement à la séparation et a souligné que sa position avait suscité des attaques sur les réseaux sociaux, certains internautes le qualifiant de traître et d'autres réclamant son exécution.

Il trouve ironique d'être présenté comme un laquais du gouvernement fédéral, a-t-il déclaré, puisque c'est son gouvernement qui a lancé des contestations judiciaires contre la taxe fédérale sur le carbone, le projet de loi C-69 sur les oléoducs et l'interdiction fédérale des plastiques.

Des gens «perpétuellement en colère»

Selon lui, le séparatisme est, et a toujours été, le cri de ralliement d'un petit groupe d'Albertains volages et mécontents.

«On parle de quelques milliers de personnes tout au plus», a-t-il soutenu.

«Et si vous les suivez sur les réseaux sociaux, ils attaquent tous l'Ukraine et applaudissent Vladimir Poutine (le dirigeant russe). Ils applaudissaient tous Donald Trump (le président américain), lorsqu'il attaquait le Canada avec des droits de douane et menaçait de nous faire devenir le 51e État.

«Ce sont simplement des gens qui sont perpétuellement lésés, perpétuellement en colère, et c'est tout simplement leur quotidien.»

Le politicien de 57 ans a déclaré que les séparatistes sont à l'œuvre en Alberta depuis un demi-siècle et qu'ils ont eu peu de succès, à l'exception de Gordon Kesler, du parti Western Canada Concept, lors d'une élection partielle en 1982.

«Ils n'ont réussi à gagner qu'une seule circonscription, une seule fois, lors d'une élection partielle à Olds-Didsbury en 1982, au plus fort du Programme énergétique national, qu'ils ont perdue peu après», a-t-il indiqué.

M. Kenney a affirmé qu'en tant que premier ministre, il avait instauré des règles référendaires, mais avec des dispositions strictes obligeant les collecteurs de signatures à recueillir des noms dans toutes les villes et les zones rurales afin d'assurer un large consensus en faveur du changement.

Il y a une différence entre les Albertains fédéralistes, frustrés par la façon dont la province est traitée, et ceux qui souhaitent une Alberta indépendante, a-t-il expliqué.

Un retour en politique?

Il serait prêt à assumer un rôle de leader public si la séparation était soumise au vote.

«L'incertitude et la division créées par un référendum seraient profondément préjudiciables pour nous, Albertains. Nous devrions plutôt consacrer notre temps, notre énergie et nos efforts à lutter pour une Alberta plus forte au sein du Canada, a-t-il plaidé. Je ne pense pas qu'ils devraient pouvoir nous entraîner dans cette version profondément conflictuelle et non violente d'une guerre civile.»

M. Kenney exclut pour l'instant tout retour en politique. Il est parti jeudi pour l'Ukraine, déchirée par la guerre, où il doit apporter de l'aide avec l'organisation humanitaire catholique des Chevaliers de Malte.

En plaisantant, il compare la politique au Code criminel.

«On me demande tous les jours: "Allez-vous y retourner?" Et je leur rappelle que 25 ans est la définition juridique d'une peine d'emprisonnement à perpétuité, alors j'ai le sentiment d'avoir payé mon dû.

«En fin de compte, il ne faut jamais dire jamais. Si certaines circonstances m'appelaient à servir et à avoir un impact significatif (en politique), je serais ouvert à cette idée. Mais je ne l'envisage vraiment pas pour le moment.»

Bill Graveland, La Presse Canadienne