L'attrait pour les vols canadiens au départ du Liban a nettement diminué l'an dernier


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Par La Presse Canadienne, 2025
OTTAWA — Des documents détaillant les efforts déployés par le Canada pour aider les citoyens et les résidents permanents à quitter le Liban l'an dernier montrent que l'intérêt initial pour les vols nolisés au départ du pays a chuté de façon spectaculaire.
En fin de compte, le Canada a dépensé près de trois fois plus pour maintenir des avions nolisés au sol que pour transporter des personnes.
Les documents, obtenus par La Presse Canadienne en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, donnent un aperçu des efforts déployés par Affaires mondiales Canada (AMC) pour aider les Canadiens souhaitant fuir les combats entre le Hezbollah et les forces israéliennes en 2024.
Ils montrent que le Canada a dépensé plus de 14 millions $ pour aider les Canadiens, les résidents permanents et les membres de leur famille à quitter le Liban l'an passé. Cette somme comprenait environ 4 millions $ pour transporter 844 citoyens canadiens, résidents permanents et membres de leur famille vers Istanbul. Les neuf vols ont décollé entre le 3 et le 12 octobre 2024.
Les documents ne précisent pas le coût exact en raison des lois sur la protection des renseignements personnels relatives aux contrats d'approvisionnement.
La majorité des neuf vols nolisés d'AMC avaient une capacité de 291 passagers, et bien qu'environ 300 ressortissants étrangers aient eu des sièges sur ces vols, des centaines de sièges sont restés vides.
Une grande partie des dépenses provenait des plans d'urgence mis en place près de deux mois avant la reprise des hostilités transfrontalières entre Israël et le Hezbollah fin septembre. Le Canada a dépensé 11 millions $ pour maintenir des avions nolisés en attente dès le 3 août 2024, dans le cadre d'un contrat de service de 90 jours.
«Compte tenu de l'insécurité croissante dans la région et de la nécessité d'être prêt à faire face à différentes éventualités, AMC a dû prévoir plusieurs scénarios possibles», a expliqué un porte-parole d'Affaires mondiales Canada à La Presse Canadienne.
AMC a exhorté les Canadiens au Liban à quitter le pays, alors qu'Israël et le groupe militant Hezbollah échangeaient des frappes de missiles à la frontière israélo-libanaise.
À l'été et à l'automne 2024, le Canada a recensé 25 000 Canadiens dans la région grâce à son service d'Inscription des Canadiens à l'étranger et les a tous contactés pour les informer des efforts d'AMC.
Environ 7400 personnes ont rempli des formulaires d'admission pour obtenir une aide d'urgence, mais seulement 1200 ont accepté l'offre du gouvernement. Parmi elles, 844 personnes ont pris l'avion à bord d'un vol nolisé et 467 autres ont pris un vol commercial et réservé des sièges par AMC.
Les passagers des vols commerciaux ont payé les frais aux compagnies aériennes directement.
Les documents suggèrent également certaines des leçons que le gouvernement a tirées du programme d'aide au départ du Liban.
Alors qu'Ottawa s'appuyait initialement sur l'Inscription des Canadiens à l'étranger pour estimer le nombre de personnes qu'il pourrait devoir aider en cas d'évacuation militaire à grande échelle, les documents suggèrent que les responsables ont estimé que les formulaires d'admission en ligne étaient un moyen plus précis de prédire le nombre de personnes souhaitant partir.
Le représentant d'AMC a déclaré que les formulaires en ligne offraient également plus d'informations sur les personnes susceptibles d'avoir besoin d'une aide supplémentaire, notamment des informations sur les passeports pour la présélection.
Un représentant d'Affaires mondiales Canada a également dit que, contrairement à l'évacuation militaire du Liban en 2006, AMC avait reçu l'ordre de gérer cette opération selon le principe du recouvrement des coûts. L'évacuation de 2006, qui a vu environ 15 000 Canadiens fuir le pays, a coûté 94 millions $ aux contribuables.
Une note de service du 30 juillet 2024 signée par David Morrison, sous-ministre des Affaires étrangères, indiquait que le déploiement d'une telle évacuation — appelée opération d'évacuation des non-combattants, ou NEO — en 2024 serait «la plus importante opération d'évacuation civile canadienne jamais menée».
Or, AMC n'a jamais déclenché la NEO. Au lieu de cela, l'organisation a réservé des blocs de sièges sur des vols de Middle East Airlines à destination d'Istanbul, puis a utilisé les vols nolisés.
Le Canada a réservé 100 sièges sur le premier vol commercial du 29 septembre. Bien que tous les sièges aient été réservés, on a constaté plusieurs non-présentations et doublons.
«Cela reflète l'insécurité et les difficultés de transport pour les clients, ainsi que la décision personnelle très difficile de partir compte tenu de l'incertitude de l'avenir», a écrit Sébastien Beaulieu, le directeur général de la gestion des urgences et des conseils aux voyageurs d'AMC, dans l'un des nombreux bulletins quotidiens envoyés tout au long de l'opération.
L'un des bulletins ultérieurs de M. Beaulieu suggérait que certaines personnes hésitaient à fuir en raison de leurs inquiétudes concernant leur famille élargie, de la fragilité des liens avec le Canada et de la crainte d'abandonner leurs biens.
Le premier vol nolisé d'AMC, le 3 octobre, était complet, avec 254 passagers.
Les options commerciales jugées plus flexibles
L'ambassade du Canada a été inondée de centaines d'appels et de milliers de formulaires de demande en ligne de personnes s'interrogeant sur les options de départ, ce que l'AMC a utilisé pour justifier sa décision de mobiliser d'autres vols nolisés.
«Afin de garantir que nous avons offert des options à tous les Canadiens intéressés ayant rempli un formulaire d'admission, nous recommandons de poursuivre notre approche (des vols nolisés) les 5 et 6 octobre», a noté M. Beaulieu le 4 octobre.
Mais la demande a été de courte durée. Deux jours plus tard, M. Beaulieu a indiqué que seuls 20 % des personnes intéressées par les options de départ du pays avaient adopté ces options. Il a ajouté que les gens trouvaient les options commerciales plus flexibles.
Dans une autre mise à jour, Sébastien Beaulieu a signalé que près de 50 personnes qui avaient payé pour des sièges nolisés ont demandé un remboursement, car elles ne voulaient pas partir ou préféraient une autre option.
Affaires mondiales Canada a franchi ce que M. Beaulieu a qualifié d'«étape majeure en matière d'innovation» en mettant en œuvre une solution de paiement basée sur Shopify pour traiter les paiements de ses sièges nolisés.
«Cela aura des répercussions sur les crises mondiales, qui impliquent un recouvrement des coûts, à commencer par le Liban. Et cela peut être transposé à grande échelle, comme modèle pour la collecte d'une gamme de frais de services consulaires à travers le réseau» a-t-il rédigé le 8 octobre.
Jusqu'alors, a-t-il expliqué, les paiements par carte de crédit ne pouvaient être effectués que par téléphone ou en personne dans les missions canadiennes, ce qui a entraîné de multiples erreurs.
Le Canada a finalement récupéré 318 693 $ des coûts des vols nolisés en facturant aux passagers 330 $ US par siège, soit l'équivalent approximatif d'un vol commercial à l'époque.
Nick Murray, La Presse Canadienne