Nous joindre
X
Rechercher
Publicité

La directrice du musée de l'immigration à Halifax accusée de créer un climat de peur

durée 16h19
11 décembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
durée

Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

HALIFAX — La directrice du Musée canadien de l'immigration à Halifax a intimidé son personnel et créé un climat de peur qui a causé des dommages émotionnels à de nombreux employés, selon un nouveau rapport de la commissaire à l'intégrité du secteur public fédéral.

Le rapport de la commissaire Harriet Solloway cite des éléments de preuve suggérant que Marie Chapman s'est livrée à des comportements inappropriés pendant plus d'une décennie, menant de graves violations du code de conduite du secteur public et du code de conduite du musée.

«La directrice générale a créé un climat de peur qui a dissuadé les employés de faire part de leurs préoccupations et a fait craindre à beaucoup d'entre eux d'être réprimandés, voire de perdre leur emploi, s'ils décidaient de s'exprimer», indique le rapport.

Les résultats de l'enquête de deux ans menée par Mme Solloway, présentés mercredi au Parlement, allèguent que les fautes professionnelles de Mme Chapman comprennent l'utilisation d'un langage offensant et inapproprié, l'intimidation d'employés, la création d'un climat de peur, le fait de crier et, de manière générale, la maltraitance du personnel.

«Si chaque incident pris isolément ne constitue pas nécessairement une violation grave du code de conduite, la nature répétitive des actes de Mme Chapman, qui ont eu un impact sur plusieurs employés, en augmente la gravité», note le rapport.

«Notre enquête a révélé que Mme Chapman désignait son équipe de direction, ou SLT (selon l'appellation anglaise "senior leadership team"), en utilisant le terme "salopes". Mme Chapman a utilisé ce terme en public et en présence d'employés du musée.»

Dans les espaces numériques anglophones, les lettres SLT sont parfois utilisées comme diminutif du mot «slut» (salope).

Mme Solloway a conclu que, même si Mme Chapman avait un objectif humoristique, un tel langage n'est pas conforme aux normes attendues des dirigeants du secteur public sur leur lieu de travail.

À Ottawa, le ministre de la Culture, Marc Miller, a été interrogé sur la possibilité de licencier Mme Chapman, dont le mandat avait été prolongé en octobre de 90 jours.

«Les ministres ne sont pas en mesure de licencier les directeurs de musée, a-t-il remarqué. Je m'attends à ce que le conseil d'administration (du musée) examine sérieusement ce rapport et prenne les mesures appropriées.»

M. Miller a tout de même déclaré que les actes allégués étaient «tout à fait inacceptables»; «si l'une de ces allégations s'avère vraie, j'attends du conseil d'administration qu'il fasse son travail.»

Le rapport accuse également Mme Chapman d'avoir :

— Classé les femmes travaillant au musée par âge.

— Déclaré qu'il n'y avait «aucun bel homme» au musée.

— Donné à certains employés des surnoms liés à leur apparence physique ou à leur comportement.

— Déclaré qu'une athlète féminine avait l'air trop masculine pour figurer dans un produit du musée.

Mme Solloway a indiqué que 20 témoins avaient été interrogés, dont Mme Chapman. Le musée, un organisme public indépendant du gouvernement fédéral, compte 56 employés permanents.

Neuf employés ont déclaré avoir peur du comportement de Mme Chapman. Un employé a témoigné souffrir de crises de panique lorsqu'il se rendait au travail, affirmant que son anxiété «grimpait en flèche».

Le commissaire a recommandé qu'un expert externe évalue le bien-être des employés afin de déterminer le type de soutien dont ils pourraient avoir besoin.

Défense de Mme Chapman

En réponse au rapport, Mme Chapman a soumis une déclaration au commissaire dans laquelle elle nie la quasi-totalité des allégations portées contre elle, arguant que le manque de détails dans le rapport donne une fausse impression de la fréquence et de l'ampleur de certains événements.

Mme Chapman a également déclaré que plusieurs des personnes interrogées par le commissaire ne faisaient pas partie du personnel du musée.

«Tout lecteur non informé ne serait pas conscient de la nature peu fréquente de nombreux événements décrits dans le rapport, a soutenu Mme Chapman. Compte tenu des preuves exhaustives fournies dans ma réponse du 29 mai (...) je vous invite respectueusement à reconsidérer vos conclusions.»

La directrice a toutefois confirmé qu'elle avait qualifié son équipe de direction de «salopes». Mais elle a fait valoir qu'en tant que membre de cette équipe, ce commentaire avait été fait «par solidarité» et ne visait pas à manquer de respect.

Mme Chapman a également insisté sur le fait qu'elle n'avait jamais créé un climat de peur ni menacé de licencier qui que ce soit. Elle a fait valoir que certaines décisions et certains commentaires lui avaient été attribués à tort ou avaient été sortis de leur contexte. Mme Chapman a souligné que certaines de ses déclarations avaient été faites avant que le musée ne devienne une institution fédérale.

Elle a également rejeté les allégations selon lesquelles elle aurait pris un employé pour cible.

«Ce qui peut sembler être du ciblage reflète les défis difficiles en matière de gestion qui ont été ressentis non seulement par moi, mais aussi par tous les autres membres de l'équipe de direction pendant cette période».

Elle a nié avoir fait des remarques désobligeantes sur la coiffure d'un collègue.

La directrice conclut ses remarques en insistant sur le fait que, pendant près de 20 ans de travail au musée, le conseil d'administration n'a jamais remis en question sa conduite. Elle a aussi affirmé n'avoir jamais reçu d'avertissements, d'évaluations négatives ou de mesures disciplinaires.

«Bien que je ne sois pas d'accord avec les conclusions présentées dans le rapport, je reconnais et j'assume ma responsabilité en tant que dirigeante du musée, a-t-elle indiqué. Je suis ouverte à toute opportunité d'apprentissage et d'amélioration et j'ai hâte de faire appel à un expert externe pour nous guider dans ce processus.»

Michael MacDonald, La Presse Canadienne