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Les libraires albertains observent une hausse des ventes de livres retirés des écoles

durée 13h26
4 septembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Par La Presse Canadienne, 2025

EDMONTON — Un décret du gouvernement albertain interdisant certains livres dans les bibliothèques scolaires ne semble pas dissuader les gens de les lire, affirment les gérants de plusieurs librairies.

Kelly Dyer, d'Audreys Books à Edmonton, a indiqué que la librairie avait constaté une hausse des ventes depuis juillet, au moment où la province a annoncé l'interdiction des livres à contenu sexuel explicite.

«Nous avons clairement constaté une hausse, a indiqué Mme Dyer. Même les ventes de livres interdits ont grimpé en flèche.»

Parmi les achats les plus populaires, a-t-elle précisé, figurent les quatre romans graphiques sur le passage à l'âge adulte cités par le gouvernement pour justifier son décret, ainsi que «La Servante écarlate» de Margaret Atwood, un titre que le conseil scolaire public d'Edmonton a inscrit sur une liste des livres à retirer des rayons.

«Beaucoup de gens respectent Margaret Atwood, son écriture et ce genre de choses, et je pense que c'est simplement par pure curiosité qu'ils se demandent pourquoi ce livre figure dans une liste comme celle-ci», a souligné Mme Dyer.

Le ministre de l'Éducation de l'Alberta a déclaré que l'arrêté était nécessaire pour que les jeunes ne soient pas exposés à du contenu sexuel inapproprié dans les écoles. Les conseils scolaires ont reçu l'ordre de retirer ce type d'ouvrage des bibliothèques d'ici le 1er octobre.

Avant la rentrée scolaire cette semaine, les écoles publiques d'Edmonton ont annoncé leur intention de retirer plus de 200 titres répondant aux critères du gouvernement, dont «La Servante écarlate» et d'autres classiques, comme «1984» de George Orwell et «Je sais pourquoi chante l'oiseau en cage» de Maya Angelou.

La liste a suscité l'indignation de nombreuses personnes, dont l'autrice canadienne Margaret Atwood, qui a écrit sur les réseaux sociaux que les gens devraient acheter des exemplaires de «La Servante écarlate» avant «qu'ils ne procèdent à des autodafés publics».

La première ministre Danielle Smith, qui a accusé la division scolaire de «conformité abusive», a annoncé mardi que l'arrêté était en cours de révision afin de restreindre uniquement les livres contenant des images sexuellement explicites, et non les classiques de la littérature. L'arrêté initial a été suspendu.

Julie King-Yerex, copropriétaire de Magpie Books à Edmonton, a déclaré que des clients sont venus à la librairie demander ironiquement où se trouvait la section de «conformité abusive».

Elle a remercié les écoles publiques d'Edmonton pour la façon dont elles ont géré l'ordre du gouvernement, affirmant que la liste avait incité la province à lire attentivement ses restrictions tout en encourageant les gens à rechercher ces livres.

«Toute censure, quelle qu'elle soit, est un pas vers le fascisme, a-t-elle lancé. La grande majorité des personnes avec qui j'ai interagi, du moins, sont farouchement opposées à toute forme d'interdiction de livres, et cela incite les gens à vouloir lire ce qu'on leur interdit.»

Laurel Dziuba, gérante de Pages On Kensington à Calgary, a également constaté une augmentation des ventes dès qu'il était question d'interdire des livres.

«Même lorsque des événements se produisent aux États-Unis, des gens commandent les livres.»

Mme Dziuba a déclaré que l'ordonnance initiale de la province était «profondément déroutante» et visait probablement à détourner l'attention des Albertains d'autres enjeux.

Elle a également expliqué que les enfants qui viennent dans sa librairie à la recherche de livres destinés aux adultes sont prévenus de ce qui les attend.

«Je ne pense pas qu'il y ait d'argument en faveur de la censure, a-t-elle affirmé. En pratique, elle a l'effet inverse, car elle est encourageante. Les gens veulent acheter ces livres pour savoir ce qu'ils contiennent.»

Elle a ajouté que si les parents s'inquiètent de ce que lisent leurs enfants, ils devraient lire avec eux ou demander conseil à un libraire.

Mme Dyer, mère d'une fille de 15 ans, a affirmé qu'il existe «une certaine dose de bon sens» concernant les livres.

«Si ces livres se trouvaient dans une école primaire, ce ne serait pas encore l'âge approprié pour ces livres», a-t-elle précisé.

«Les écoles ont besoin de bibliothécaires capables de surveiller ce genre de choses, afin que le matériel adapté à l'âge soit disponible. Mais en matière de censure et d'interdiction de livres, non, ce n'est pas une bonne chose.»

Aaron Sousa, La Presse Canadienne