Ottawa dénonce des restrictions alimentaires «troublantes» à Gaza


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Par La Presse Canadienne, 2024
OTTAWA — Le député responsable de l'aide étrangère du Canada appelle Israël à cesser de restreindre l'acheminement de l'aide alimentaire vers la bande de Gaza, tandis que l'ambassadeur d'Israël réfute les allégations d'Ottawa selon lesquelles son pays viole le droit humanitaire.
Lundi, Randeep Sarai, secrétaire d'État au Développement international, s'est insurgé sur la plateforme X, écrivant que «Gaza est aujourd’hui l’endroit au monde le plus frappé par la faim — profondément troublant».
Le gouvernement israélien a mis en place une agence chargée de distribuer l'aide dans quatre localités de l'enclave palestinienne, fermant ainsi des centaines de sites gérés par des agences internationales sur le territoire.
Israël affirme que cette mesure était nécessaire pour empêcher l'aide d'atteindre le Hamas, mais le Programme alimentaire mondial des Nations unies affirme que le détournement de l'aide était loin d'être considérable.
Le nouveau système, géré par la Fondation humanitaire de Gaza, ne fonctionne pas dans les zones du nord du territoire qui, selon les ministres israéliens, devraient être vidées de leurs habitants palestiniens.
La fondation, soutenue par Israël et les États-Unis, affirme avoir distribué l'aide avec succès et conteste les informations faisant état de fusillades quasi quotidiennes sur ses sites de distribution ou à proximité.
Les Nations unies ont rejeté le nouveau système, affirmant qu'il ne répond pas à la crise alimentaire croissante dans la bande de Gaza et permet à Israël d'utiliser l'aide comme une arme.
Des groupes humanitaires ont décrit des scènes de violence chaotiques, où des foules de Palestiniens désespérés se ruent vers les centres de distribution tandis que des soldats israéliens tirent à proximité.
Des groupes humanitaires comme Oxfam affirment que le fait qu'une partie belligérante contrôle l'acheminement de l'aide, au lieu d'organisations neutres soumises à un contrôle international, crée un précédent dangereux.
«Nous appelons le gouvernement israélien à rétablir sans délai l’aide à Gaza et à permettre à l’ONU et aux humanitaires d’agir librement pour fournir une aide vitale aux civils», a écrit sur X le député Sarai, lundi.
Il a réitéré l'appel du gouvernement fédéral à un cessez-le-feu et à la libération de tous les otages par le Hamas.
«Les civils doivent être protégés et traités avec dignité. Le droit humanitaire doit être respecté», a ajouté M. Sarai.
Une version «alternative de la réalité»
Dans une publication sur les réseaux sociaux, l'ambassadeur d'Israël au Canada, Iddo Moed, a déclaré que l'aide humanitaire continuait d'être distribuée et a accusé les agences des Nations unies de choisir de «trier les faits avec soin pour dépeindre une version alternative de la réalité et diaboliser Israël». Il a répété que «l'ONU alimente le Hamas» et a insisté sur le fait que le nouveau système de distribution de l'aide fonctionne mieux que celui précédemment géré par les organisations internationales – un point de vue que pratiquement aucun pays occidental, hormis les États-Unis, ne semble partager.
«Dans un effort désespéré pour rester pertinentes, (les agences des Nations unies) critiquent les efforts déployés par Israël et ses partenaires pour faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire à la population civile», a écrit M. Moed.
Des responsables de la santé palestiniens et des témoins ont déclaré que les forces israéliennes avaient tiré mardi sur des personnes qui se dirigeaient vers un centre de distribution d'aide, tuant au moins 27 personnes. L'armée israélienne a affirmé avoir tiré «à proximité de quelques suspects» qui avaient quitté l'itinéraire prévu, se sont approchés de ses forces et ont ignoré les tirs de sommation.
Israël interdit aux journalistes étrangers d'entrer sur le territoire gazaoui sans être accompagnés de soldats israéliens.
La Fondation humanitaire de Gaza a refusé de préciser lundi si elle recevait des fonds publics ou privés du Canada.
«La Fondation humanitaire de Gaza est un organisme sans but lucratif enregistré (…) comme la plupart des organismes sans but lucratif, nous ne divulguons pas le nom de nos donateurs», a écrit l’agence dans un courriel qui n’identifiait aucun porte-parole.
Les libéraux fédéraux ont été vivement critiqués par des groupes de défense des droits de la personne pour ne pas avoir mis à exécution leur menace, le mois dernier, d’imposer des sanctions ciblées à Israël si la situation s’aggravait dans le territoire palestinien.
Depuis, les organisations internationales ont mis en garde à plusieurs reprises contre un risque de famine dans la bande de Gaza, tandis que le gouvernement israélien a annoncé son intention d’étendre les colonies en Cisjordanie.
— Avec des informations de l’Associated Press
Dylan Robertson, La Presse Canadienne