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Pékin pourrait avoir tenté de décourager des Canadiens à voter conservateur

durée 07h31
23 juin 2022
La Presse Canadienne, 2022
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Par La Presse Canadienne, 2022

OTTAWA — Une unité de recherche fédérale a détecté ce qui pourrait être une opération d'information du Parti communiste chinois visant à décourager les Canadiens d'origine chinoise de voter pour les conservateurs lors des dernières élections fédérales.

L'analyse du 13 septembre 2021 par Mécanisme de réponse rapide du Canada, qui suit l'ingérence étrangère, indique que des chercheurs ont observé des comptes de médias du Parti communiste sur la plateforme de médias sociaux chinois Douyin, partageant largement un récit selon lequel les conservateurs rompraient pratiquement les relations diplomatiques avec Pékin.

Le rapport, obtenu par La Presse Canadienne en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, a été préparé une semaine seulement avant que les Canadiens ne se rendent aux urnes.

Les libéraux de Justin Trudeau sont sortis du scrutin national du 20 septembre avec un mandat minoritaire renouvelé, tandis que les conservateurs, dirigés par Erin O'Toole, formaient l'opposition officielle.

M. O'Toole, qui n'est plus chef aujourd'hui, a affirmé dans un balado enregistré ce mois-ci que les conservateurs avaient perdu huit ou neuf sièges à cause de l'ingérence étrangère de la Chine.

Mécanisme de réponse rapide du Canada (MRR Canada), basé à Affaires mondiales Canada, produit des analyses de données ouvertes pour tracer les tendances, les stratégies et les tactiques en matière d'ingérence étrangère.

Son travail soutient le MRR du G7, une initiative visant à renforcer la coordination pour identifier et répondre aux menaces pesant sur les grandes démocraties industrielles.

L'analyse des messages sur le parti conservateur faisait partie des efforts de MRR Canada pour surveiller l'environnement de l'information numérique afin de détecter des signes de manipulation de l'information parrainée par un État étranger lors de l'élection générale.

Le député conservateur Michael Chong, porte-parole du parti en matière d'affaires étrangères, a déclaré dans une entrevue que l'analyse est «une autre preuve que la direction communiste de Pékin est intervenue lors des dernières élections générales en diffusant de la désinformation».

MRR Canada affirme avoir examiné manuellement les plateformes de médias sociaux chinois, notamment WeChat, Douyin, Weibo, Xigua et Bilibili, et effectué une analyse numérique à l'aide d'archives de sites web, d'outils d'écoute sociale et d'outils de classement des médias sociaux multiplateformes.

Les analystes ont d'abord remarqué le récit sur les conservateurs dans deux articles publiés le 8 septembre par le «Global Times», un tabloïd des médias appartenant à l'État.

MRR Canada pense que la couverture du «Global Times» a été motivée par un article paru dans le journal «Hill Times» d'Ottawa qui examinait les positions des partis canadiens sur les relations entre le Canada et la Chine. L'analyse indique qu'il est probable que le «Global Times» ait été la première publication chinoise à reprendre le contenu de la publication d'Ottawa, MRR Canada note que le moment a coïncidé avec le premier débat des chefs fédéraux et des chiffres de sondage de plus en plus serrés. Des articles similaires publiés par les principaux médias canadiens plus tôt en septembre, ainsi que la plateforme du parti conservateur publiée en août, n'ont suscité aucune réponse de la part des médias contrôlés par l'État en Chine, selon l'analyse.

Plusieurs comptes d'actualités WeChat populaires axés sur le Canada ont commencé à amplifier le récit du «Global Times» le 9 septembre, copiant le contenu et la forme sans créditer la publication, «obscurcissant le point d'origine du récit», ont constaté les analystes.

Les comptes ont également ajouté des commentaires sur les conservateurs aux articles, tels que «les Chinois sont effrayés par la plateforme», et se sont demandés si «les compatriotes chinois devraient soutenir les conservateurs s'ils utilisent cette rhétorique».

«Sauf mention contraire, les utilisateurs de WeChat ne sauraient pas que le récit sur les conservateurs et M. O'Toole provient du "Global Times" et supposeraient que les articles étaient des reportages originaux des comptes canadiens de WeChat.»

De nombreux comptes de nouvelles WeChat qui desservent les Canadiens sont enregistrés auprès de personnes en Chine et bien qu'il s'agisse de sources d'information bien établies, «certains peuvent avoir des liens peu clairs» avec des groupes de médias du Parti communiste chinois, selon l'analyse.

Les chercheurs ont été «incapables de déterminer s'il existe une coordination entre les médias du (Parti communiste) qui ont initialement promu le récit et les comptes d'actualités populaires WeChat qui desservent les Canadiens d'expression chinoise et qui amplifient maintenant le récit», met en garde l'analyse du 13 septembre.

«MRR Canada n'est pas non plus en mesure de déterminer s'il y a eu une activité non authentique qui a stimulé l'engagement des utilisateurs avec le récit, car les plateformes de médias sociaux chinois sont complètement non transparentes.»

Cependant, les comptes rendus des médias du Parti communiste sur Douyin, la version chinoise de TikTok, ont publié des vidéos qui reprenaient un titre du «Global Times» du 8 septembre, selon l'analyse. Par exemple, le compte Douyin de Xinhua, l'agence de presse d'État chinoise, a partagé une vidéo disant que la plateforme conservatrice mentionne la Chine «31 fois» et qu'un «expert» dit que le parti «veut presque rompre les relations diplomatiques avec la Chine».

L'ambassade de Chine à Ottawa n'a pas répondu à une demande de commentaires sur l'analyse de MRR Canada.

Jim Bronskill, La Presse Canadienne