Un suspect de l'attentat à la bombe du vol d'Air India en 1985 finalement identifié


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Par La Presse Canadienne, 2024
La police de la Colombie-Britannique croit avoir résolu un mystère vieux de plusieurs décennies en identifiant un suspect, connu sous le nom de «M. X», soupçonné d'avoir participé à l'essai d'une bombe en prévision de l'attentat terroriste contre Air India survenu en 1985.
Cependant, la police indique que le suspect est décédé avant d'être inculpé et que son nom ne sera pas divulgué.
La déclaration la Police fédérale de la Région du Pacifique, publiée lundi, survient alors que les familles commémorent le 40e anniversaire de l'attentat. Lors de ce dernier, deux bombes ciblant des vols d'Air India ont explosé. Une d'entre elles a fait 329 victimes, principalement des Canadiens.
La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a indiqué dans un courriel que les enquêteurs avaient «découvert des informations concernant un suspect qu'ils croient impliqué dans l'essai d'un engin explosif avant l'attentat terroriste contre Air India du 23 juin 1985».
La GRC n'a pas nommé le suspect, affirmant que les preuves n'étaient pas suffisantes pour confirmer sans équivoque son identification.
«Les enquêteurs confirment que le suspect est décédé», précise le communiqué.
Dans une réponse ultérieure, la police a indiqué que les enquêteurs «ont déployé des efforts considérables et délibérés au cours des dernières années pour identifier le suspect». Un rapport de commission d'enquête de 2010 a révélé que des agents du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) avaient observé M. X et d'autres suspects pénétrer dans une forêt de l'île de Vancouver, où l'essai de bombe a été entendu, quelques semaines avant que les bombes ne soient placées sur deux avions.
Les agents ne disposaient cependant pas de caméras et le suspect est resté anonyme pendant des décennies; un échec que le rapport a qualifié de «catastrophe d'inefficacité de la surveillance pré-attentat du SCRS».
Une seule personne a été reconnue coupable d'implication dans l'attentat, le fabricant de bombes Inderjit Singh Reyat, qui a plaidé coupable d'homicide involontaire en 2003 et a ensuite été reconnu coupable de parjure visant à protéger ses complices.
Deux hommes, Ripudaman Singh Malik et Ajaib Singh Bagri, ont été acquittés en 2005 à l'issue d'un procès qui a coûté près de 60 millions $. Le procès, un rapport d'enquête fédéral de 2005 et la commission d'enquête ont tous conclu que l'attaque était imputable à des sections radicales de la communauté sikhe, en quête de la fondation d'un état du Khalistan indépendant en Inde.
L'identification de M. X a été rapportée pour la première fois par Postmedia la semaine dernière, citant une entrevue avec le commissaire adjoint de la GRC, David Teboul, qui aurait déclaré que le nom du suspect ne pouvait être divulgué en raison des lois sur la protection de la vie privée.
Une bombe à bord du vol 182 d'Air India a explosé au-dessus de l'océan Atlantique, tuant toutes les personnes à bord, tandis qu'une deuxième valise piégée a explosé avant d'être transférée à bord d'un avion d'Air India. Cette dernière a pris la vie de deux bagagistes à l'aéroport Narita de Tokyo.
Se souvenir des victimes du terrorisme
Dans un communiqué, le premier ministre Mark Carney a déclaré que cette tragédie est un drame que les Canadiens ne doivent jamais oublier.
«À l’occasion de la Journée nationale du souvenir des victimes de terrorisme, nous nous souvenons des victimes de l’attentat à la bombe contre le vol d’Air India et de toutes les autres personnes qui ont perdu la vie à cause du terrorisme», a affirmé M. Carney.
«Le nouveau gouvernement du Canada s’oppose sans équivoque au terrorisme, et nous allons remplir notrse mandat de changement pour assurer la sécurité des communautés».
Le premier ministre de la Colombie-Britannique, David Eby, a indiqué dans une déclaration distincte que la province «doit s'opposer à la haine, à l'intolérance et à la division qui alimentent le terrorisme», et son gouvernement renouvelle sa détermination à «créer une société plus sûre pour tous, en hommage à ceux que nous avons perdus».
«Il s'agissait de familles entières, de gens d'affaires et d'étudiants qui avaient toute la vie devant eux, a déclaré M. Eby. Ils ont tragiquement été victimes de l'attentat terroriste le plus meurtrier de l'histoire du Canada lorsqu'une bombe a explosé à bord de leur avion. Nous partageons le deuil de leurs proches et condamnons ces actes insensés d'extrémisme violent».
Des cérémonies marquant la Journée nationale du souvenir des victimes du terrorisme se sont déroulées lundi à Vancouver, Toronto, Montréal, Ottawa et dans le comté de Cork, en Irlande.
La GRC a indiqué que des agents assisteraient à la cérémonie commémorative à Ahakista, en Irlande, près du lieu de l'écrasement du vol 182.
Le sous-commissaire retraité de la GRC Gary Bass a dirigé l'enquête policière en 1995 et assiste à la cérémonie commémorative en Irlande chaque année depuis 1997.
Dans une déclaration publiée par l'intermédiaire de la GRC, M. Bass a déclaré que toutes les personnes qui ont travaillé sur cette affaire «s’est donnée à fond, durant de nombreuses années», ajoutant que la tragédie reste gravée dans sa mémoire.
«C’est sûr que j’y pensais tout le temps , a-t-il déclaré. Peu importe si le meurtre a fait une seule victime, ou 331 comme dans ce cas-ci – on n’abandonne jamais une enquête comme celle-là, on essaie toujours de voir s’il n’y a pas autre chose à tenter.»
L'ancien législateur de la Colombie-Britannique, Dave S. Hayer, a déclaré sur Facebook que le 40e anniversaire de l'attentat rappelle que «le terrorisme n'a pas sa place dans un monde civilisé et qu'il doit être éradiqué à tout prix.»
«Malheureusement, une seule personne a été reconnue coupable de l'attentat à la bombe qui a tué 331 civils, même si les terroristes connus qui étaient responsables de ces attentats étaient surveillés et enregistrés par les forces de l'ordre canadiennes avant l'attentat», a déclaré M. Hayer, qui a souvent parlé de l'attentat à l'Assemblée législative provinciale au cours de ses 12 années de mandat.
En 2022, le suspect acquitté Ripudaman Singh Malik a été tué en Colombie-Britannique par deux tueurs à gages condamnés à la prison à vie. Leurs motivations n'ont jamais été révélées par la police ni par les procureurs.
Chuck Chiang, La Presse Canadienne