Expropriés pour rien?

Par Claude-André Mayrand
Alors que les travaux pour la nouvelle Place Bell sont sur le point de commencer, deux propriétaires qui ont leur maison érigée sur l’ancien site prévu pour l’amphithéâtre devront quitter avant le 1er juin, la Ville de Laval les ayant expropriés à l’époque où elle voulait y construire l’aréna.
L'Écho de Laval a obtenu la confirmation de la Ville que tous les propriétaires de terrains compris dans le quadrilatère formé par l’autoroute 15 et les boulevards du Souvenir, Daniel-Johnson et Saint-Martin allaient devoir quitter malgré le fait que le projet prévu initialement pour ce site ait changé de localisation.
La Place Bell sera finalement construite sur le boulevard de la Concorde, près du métro Montmorency.
Sur le boulevard du Souvenir, deux résidences sont érigées, un immeuble locatif au 2995 et une maison jumelée à un établissement agricole, au 3005, qui attirait bon nombre de clients chaque été.
Un long processus
C’est en mars 2010 que la Ville a entrepris ses démarches d’expropriation, alors que les deux propriétaires du 2995 et du 3005 ont reçu un avis de réserve foncière pour fins publiques.
L’avis d’expropriation officiel a été envoyé au 3005 le 6 décembre 2011 et au 2995 le 19 avril 2012.
Le transfert de propriété a rapidement suivi pour l’immeuble locatif du 2995, le 19 juillet 2012, et la Ville a pris la possession légale de l’immeuble le 10 août 2012.
Quant à la ferme, le transfert de propriété s’est fait le 2 octobre 2012 et la prise de possession légale le 19 octobre 2012.
Entretemps, la confirmation du déménagement du lieu de la Place Bell a été annoncée le 10 octobre.
La Ville se défend
La Ville se défend d’avoir mené à terme le processus pour la ferme alors que le projet qui occasionnait l’expropriation était déplacé.
«Le transfert du droit de propriété s’est fait le 2 octobre alors que le 19 octobre représente la prise de possession légale des lieux», offre en guise d’explication Nadine Lussier, du Service des communications de la Ville, lorsque l’Écho soulève le fait que la Ville aurait pu cesser le processus d’expropriation à la suite de l’annonce du déménagement.
«La Ville était propriétaire d’environ 90 % du quadrilatère et de petits lots appartenant à différents propriétaires dans sa portion sud auraient pu entraver tout projet de développement majeur», ajoute Mme Lussier, en parlant de l’expropriation de tous les lots concernés.
Pas de nouveau projet en vue
Pendant la préparation de ce dossier, l’Écho a vérifié à plusieurs reprises auprès de la Ville si des projets étaient en élaboration pour le site.
La Ville admet que le site est très intéressant, mais il semble qu’aucun projet n’y soit prévu, pour le moment.
«Le quartier de l’Agora est un emplacement de choix dans la cadre de la démarche urbanistique ÉvoluCité et il y aura des projets développés pour ces terrains, affirme Nadine Lussier. Il est cependant prématuré d’en dévoiler les détails.»
Quant à l’avenir réservé aux bâtiments érigés sur les terrains du 2995 et du 3005 boulevard du Souvenir, la Ville ne veut pas affirmer à quel moment ils seront démolis.
L’Écho a rejoint les propriétaires expropriés des deux immeubles, qui ont préféré ne pas commenter l’affaire pour ne pas nuire aux procédures d’indemnisation qui sont toujours en cours.
Les locataires avisés sur le tard
Les locataires du 2995 boulevard du Souvenir ont été avisés du processus d’expropriation de leur propriétaire près de deux mois après la prise de possession de la Ville.
Selon les documents consultés par l’Écho, les locataires ont été avisés des procédures par une lettre datée du 18 septembre 2012 et acheminée par un huissier quelques jours plus tard.
La lettre stipule que la Ville est désormais propriétaire de l’immeuble depuis le 19 juillet 2012 et qu’elle exige que les locataires quittent les lieux pour le 31 décembre, en leur offrant les trois dernières mensualités de leur loyer gratuitement.
Le 5 décembre dernier, la Ville a autorisé les locataires et les propriétaires à occuper les lieux jusqu’au 1er juin 2013, sans aucun paiement de loyer.
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Ce n’est pas la première fois qu’un citoyen se fait exproprier pour un projet qui n’aura finalement pas lieu.
En 2010, Richard Cardin, un résidant de Charlemagne, a vu sa maison et son atelier de mécanique automobile être récupérés par la municipalité. La demeure de M. Cardin se trouvait dans le tracé d’un train de banlieue qui n’a jamais vu le jour.
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