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Régime linguistique fédéral versus régime linguistique provincial

Deux juristes s'opposent sur la mention de la Charte de la langue française dans C-13

durée 15h00
4 octobre 2022
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Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne

Deux éminents juristes ont présenté des opinions divergentes quant à la mention de la Charte de la langue française dans le projet de loi visant à moderniser la Loi sur les langues officielles, lors d'une comparution lundi devant un comité sénatorial.

Questionné par le sénateur montréalais Tony Loffreda qui se demandait s'il s'agit d'un «terrain glissant», l'ancien juge de la Cour suprême du Canada, Michel Bastarache, a été le premier à répondre pour dire qu'il s'oppose à ce qu'une loi fédérale fasse référence à une loi provinciale.

«Le régime linguistique fédéral est très différent du régime linguistique provincial, et le rôle par exemple du commissaire aux langues officielles ne ressemble en rien au rôle de l'Office de la langue française, a-t-il soutenu. Je ne voudrais pas voir les institutions fédérales sous enquête de l'Office de la langue française ou d'enquêtes sur leur conformité avec des obligations qui découlent de lois québécoises qui n'ont pas été adoptées par le parlement fédéral.»

La réforme proposée de la Loi sur les langues officielles reconnaît que la Charte de la langue française affirme que le français est la langue officielle du Québec. Elle prévoit également qu'une entreprise de compétence fédérale peut s'assujettir volontairement à la Charte de la langue française et que celle-ci remplacerait alors la loi fédérale pour ce qui concerne les communications avec les consommateurs et la prestation de services au Québec.

La Loi sur les langues officielles a pour objectif de promouvoir les langues minoritaires, ce qui n'est pas le cas de la loi 101 du Québec, a ajouté lundi l'ancien juge et militant pour les droits des minorités linguistiques au Canada.

«Alors quand l'objet même des lois n'est pas le même, ou n'est pas conciliable, je ne vois vraiment l'utilité de faire ça. Si le fédéral est d'accord avec certaines dispositions de la loi québécoise, ben, il n'a juste qu'à les adopter lui-même», a-t-il lancé.

Changement de philosophie
Le professeur de droit constitutionnel et ancien ministre du Parti libéral du Québec Benoît Pelletier a pour sa part annoncé qu'il est, lui, favorable à ce que la loi fédérale démontre «une ouverture» à l'application de la Charte de la langue française.

«Est-ce que cependant la mention de la Charte de la langue française légitime cette loi? La réponse est oui, a-t-il analysé. Il y a effectivement un changement de philosophie dans l'ordre fédéral de gouvernement (...) où on cherche à tenir compte davantage de la précarité du français au Canada (...) et où on cherche à tenir compte de la spécificité québécoise.»

Mais le projet de loi C-13 «ne dit pas» que la Charte de la langue française va s'appliquer aux entreprises privées de compétence fédérale, mais bien qu'elles «peuvent décider que la Charte de la langue française s'applique à elle», a-t-il souligné.

La professeur Pelletier a donné une clé pour interpréter le bras de fer qui se joue entre Québec, qui vient d'adopter la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, aussi appelée loi 96, visant à modifier la loi 101, et Ottawa qui est à moderniser sa loi sur les langues officielles.

Dans sa déclaration d'ouverture, il a indiqué que bien que des lois provinciales puissent s'appliquer à des entreprises privées de nature fédérale, «bien entendu, s'il devait y avoir un conflit, c'est la règle de la prépondérance fédérale qui s'appliquerait, c'est-à-dire que c'est à la loi fédérale que nous donnerions la priorité.»

Le juge Bastarache a pour sa part également plaidé pour l'adoption de C-13 et que les détails devraient ensuite être traités dans des règlements puisqu'il «n'y a rien de vraiment important qui manque» dans le projet de loi.

«La loi elle-même établit des principes, des objectifs et finalement un cadre juridique, mais on ne doit pas essayer de régler tous les problèmes qui peuvent se poser en modifiant la loi, a-t-il dit. C'est ça qui arrive quand on demande à tout le monde: "Qu'est-ce que tu voudrais ajouter? Qu'est-ce que tu voudrais changer?". Pis là on se retrouve avec une liste de cinquante affaires pis on est en train de tout retarder comme s'il n'y avait pas un progrès significatif dans ce qui est déjà là.»

En juin, le gouvernement Trudeau s'était fait accuser par le Bloc québécois de «bulldozer» les travaux du comité responsable d'étudier le projet de loi en tentant de forcer la tenue de l'étude article par article sur deux jours. Les conservateurs avaient pour leur part estimé que le projet de loi pourrait être voté d'ici la fin de l'année.

Michel Saba, La Presse Canadienne

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