Plus du double des objectifs de l'Accord de Paris
Les énergies fossiles canadiennes menacent le climat mondial, selon un rapport

Par La Presse Canadienne
Le Canada et d'autres importants pays producteurs de combustibles fossiles compromettent les efforts mondiaux pour atteindre des objectifs clés de lutte contre le changement climatique, selon un nouveau rapport international. Les niveaux de production d'ici 2030 devraient être plus du double de ce que visait l'Accord de Paris.
Si certains pays se sont engagés dans une transition vers les énergies propres, d'autres semblent revenir «à une stratégie obsolète, dépendante des combustibles fossiles», selon le rapport.
«L'échec collectif persistant des gouvernements à freiner la production de combustibles fossiles et à réduire les émissions mondiales signifie que la production future devra diminuer plus fortement pour compenser», indique le rapport sur l'écart de production, produit par trois organismes de recherche sur le climat.
«Ces réductions plus importantes seront plus difficiles et plus coûteuses à réaliser, en raison du renforcement des infrastructures de combustibles fossiles mises en place dans les années 2020 et de l'accélération des réductions désormais requises.»
Le rapport suggère que les pays prévoient désormais de produire 120 % de combustibles fossiles de plus en 2030 que ce qui est compatible avec un réchauffement climatique de 1,5 degré, et 77 % de plus que ce qui est compatible avec une limite de deux degrés. Cet écart de production – la différence entre les réductions nécessaires pour maîtriser les émissions et la production prévue – est encore plus important qu'il y a deux ans, selon le rapport.
Le charbon présente toujours le plus grand écart, avec des niveaux de production en 2030 qui devraient être 500 % supérieurs à une trajectoire de 1,5 degré, et 330 % supérieurs à une de deux degrés, selon le rapport. La production mondiale de pétrole et de gaz est respectivement 31 % et 92 % supérieure à ce qui est compatible avec un objectif de 1,5 degré, ou 16 % et 33 % supérieure à une trajectoire pour deux degrés.
Ces garde-fous de température inscrits dans l'Accord de Paris de 2015 visent à éviter certains des impacts climatiques les plus catastrophiques et irréversibles. L'objectif plus ambitieux de 1,5 °C a été promu par les petits États insulaires et soutenu par un consensus scientifique émergent, démontrant qu'il réduirait les risques de chaleur extrême, d'élévation du niveau de la mer et d'inondations côtières.
Dix ans plus tard, des études suggèrent que l'objectif de 1,5 °C pourrait bientôt être dépassé, les scientifiques exhortant les pays à tout mettre en œuvre pour freiner le réchauffement et à mettre en place des mesures visant à faire baisser les températures mondiales.
Réchauffement canadien
Parmi les 20 principaux pays producteurs de combustibles fossiles présentés dans le rapport sur l'écart de production, l'augmentation prévue de la production pétrolière du Canada pour 2030, par rapport au niveau de 2023, n'est dépassé que par l'Arabie saoudite, le Brésil, les États-Unis et le Nigéria. Le Canada se classe parmi les quatre premiers producteurs de pétrole, avec environ 6,5 % du total mondial.
La contribution du Canada à la production de combustibles fossiles est probablement sous-estimée dans le rapport, car celui-ci s'appuie sur des prévisions énergétiques de 2023, avant que le gouvernement ne donne le feu vert à plusieurs nouveaux projets de gaz naturel liquéfié, a souligné Nichole Dusyk, collaboratrice du rapport et conseillère principale en politiques à l'Institut international du développement durable.
L'expansion de la production pétrolière et gazière intervient également alors que le Canada se retire de certaines politiques climatiques clés, a ajouté Mme Dusyk.
Le premier ministre Mark Carney a abrogé la tarification du carbone et suspendu l'obligation de vente de véhicules électriques. Il s'est également montré évasif quant aux objectifs d'émissions légalement inscrits pour 2030 et 2035, bien que le gouvernement affirme toujours viser la neutralité carbone d'ici 2050.
L'avenir de la politique fédérale de plafonnement des émissions du secteur pétrolier et gazier semble également incertain. L'Alberta et des groupes de l'industrie pétrolière ont dénoncé cette politique, la qualifiant d'obstacle à la croissance, et ont exigé son annulation. Entre-temps, l'Alberta a gelé son prix du carbone industriel pour 2026, et la Saskatchewan a décidé de prolonger la durée de vie de ses centrales au charbon.
Le rapport sur l'écart de production publié lundi a également condamné le Canada pour les dizaines de milliards de dollars dépensés pour l'achat et la construction du pipeline Trans Mountain.
«Nous continuons d'alimenter les changements climatiques, a plaint Mme Dusyk. Les Canadiens en subissent les conséquences sous forme de vagues de chaleur, d'inondations, de sécheresses et de feux de forêt. Cela affecte leur qualité de vie, et cela affecte aussi notre économie. Les gens en paient le prix: leurs assurances, la destruction de leurs maisons et de leurs propriétés.»
Malgré certaines conclusions pessimistes, le rapport met également en lumière des tendances prometteuses.
Les technologies d'énergie propre – notamment l'énergie solaire, les batteries et les véhicules électriques – continuent de battre des records, avec un déploiement accéléré et une baisse rapide des coûts de production. Le coût des énergies renouvelables a chuté de façon spectaculaire ces dernières années et constitue désormais la forme la moins chère de production d'électricité dans une grande partie du monde, précise le rapport.
Jordan Omstead, La Presse Canadienne